Coucou les boys and girls ! Si je vous salue de manière très joviale aujourd’hui, c’est parce que ce qui va suivre va être sombre, beaucoup plus sombre… Nous allons parler d’un jeu obscur, peu connu, que personne ou presque n’a vu de ses yeux en version originale. Un jeu entouré d’une aura mystère, limite mystique, du fait de sa rareté et du peu d’informations qu’on a dessus. Nous allons faire un bon dans le temps, et revenir plusieurs années voir décennies en arrière, alors plongez vous dans le noir, prenez un bon verre de vin ou d’ice tea, installez vous confortablement dans votre siège, et gardez toujours un œil sur ce qu’il se passe autour de vous, car je vais vous parler ce soir de Killswitch.

Alors non, pour information, nous n’allons pas parler du FPS Killswitch sorti en octobre 2003 sur PS2, PC, Xbox et GBA, édité par Namco. Non, ce serait trop facile (et surtout, ce ne serait pas intéressant). Il faut revenir à plus vieux pour le jeu qui nous intéresse, et plus précisément à 1989, année de la parution du fameux Killswitch.

Lors d’un printemps plutôt froid, un jeu sur micro-ordinateur sort, développé par une boîte répondant au nom de Karvina Corporation. Son nom : Killswitch (maintenant, vous commencez à le connaître). Il s’agit d’un jeu entre le jeu d’aventure à la Alone in the Dark old school et Silent Hill, le tout en 2D pixélisée et monochrome, avec des musiques en MIDI très lentes aux accents d’Europe de l’Est.

Dans ce jeu, vous incarnez au choix Ghast, un démon invisible, ou Porto, une jeune femme visible elle. Selon le personnage choisit en début de partie, le jeu est différent : Ghast peut attaquer, mais le jeu (très orienté plate-forme) est plus difficile avec plus de combats qu’avec Porto, qui ne peut attaquer, mais le jeu s’apparente plus à un point’n click. Bizarrement, beaucoup de monde après le premier niveau recommençait le jeu après avoir choisi Ghast car il était trop difficile… Bande de chiffes molles !

Mais revenons-en à l’histoire… Pour les raisons que je viens de vous citer, presque personne ne connaît l’histoire de Ghast, mais celle de Porto est plus connue. L’héroïne se réveille dans un endroit plongé dans le noir, avec pas mal de blessure, et un mal de crâne. Ce lieu a l’air hostile, et elle ne veut qu’une chose : fuir. Elle va donc chercher à s’enfuir en escaladant les différentes zones, qui se révèlent être une mine de charbon où elle travaillait auparavant. Et pourquoi elle s’est réveillée blessée me demanderez vous ? Au fil de l’aventure et des enquêtes menées, il semblerait que la mine se soit effondrée après l’arrivée de démons semblables à Ghast, de golems de charbon et également de haut-gradés de la société Sovatik, qui exploite la mine, et qui sont reconnaissables car vêtus de rouge, la seule couleur du jeu en dehors du noir, du blanc et du gris. On ne croisera pas de boss à battre dans cette aventure, le but n’étant que de se déplacer en prenant un compte un élément important : Porto peut changer de taille entre les passages confinés des niveaux. Ces changements seraient aléatoires, mais il semblerait qu’un ingénieur d’une grande école du Kansas ait compris le pattern de ces changements, mais… pour des raisons qui seront évoquées plus tard, ces recherches ont été perdues.

Porto découvrira après avoir inspectée des enregistrements audio, des fichiers, des rapports trouvés ça et là, en examinant les corps d’anciens collègues et en déchiffrant pas mal de codes disséminés dans le jeu, que les contre-maîtres, sous pression de leurs supérieurs pour que la production de charbon soit augmentée, ont falsifié des rapports de rendement et ont caché les manques de certains travailleurs peu productifs pour faire bonne figure. Mais le pot aux roses aurait été découvert, et c’est pour cela que Sovatik a commandé une inspection inopinée. Les cravatés arrivèrent dans la mine pour inspecter le travail de chaque mineur, et à chaque fois que la production ralentissait, les hommes en rouge leur donnaient de petits coups de poignard pour les forcer à ne pas ralentir la cadence ; oui, c’est de la torture. Petit HS dans l’histoire, il semblerait que ce passage de l’histoire soit une critique des techniques de travail soviétiques pas très « orthodoxe ». Après avoir résolu le mystère d’un code à découvrir, Porto trouve un lecteur de cassettes, afin de lire une des bandes qu’elle a trouvé. Elle y découvre une voix masculine qui raconte que le feu de la terre, qui sommeillait dans la mine, s’étaient réveillés dans le cœur des ouvriers, qui commencèrent à se rebeller. Il semblerait que ce qu’on appelle « le feu de la terre » soit en fait des démons comme l’est Ghast, c’est-à-dire de la fumée de houille et des corps gazeux qui habitent les anciennes machines de travail… Et ces machines de travail sont gigantesques, à tel point qu’on en voit très peu esthétiquement dans le jeu, seulement quelques engrenages ou parties de carters. Ces machines rendaient également fous les inspecteurs de la firme, les hantant et les faisant disparaître dans les cavernes, d’où ils ne reviendront que pour tenter de tuer Porto. Ces fameuses machines tuaient également les ouvriers, du fait du manque de protection et de la dangerosité du travail qu’elles exigeaient, et également avec les fameux nuages de fumées toxiques qu’elles dégageaient. Porto a sans doute survécu à un de ces gaz inhalé, ce qui expliquerait sa taille fluctuante.

La partie suivante du jeu devient plus cryptique, plus morbide. Mais également plus difficile. Revenons à notre fameux ingénieur qui sait beaucoup de choses sur le jeu. C’est lui qui a aidé pas mal de joueurs à réussir le passage suivant du jeu. Dans la chambre où se trouvait le magnétophone, on voit un grand four à charbon où ce dernier est transformé en « coke ». Il n’a pas de raison d’être dans cette pièce, et les joueurs ont galéré à trouvé à quoi sert cette machine, en essayant l’immolation ou en l’ignorant, sait-on jamais. Notre « héros » ingénieur a trouvé que Porto doit manger le charbon transformé pour retrouver le contrôle de son corps, et pourra ainsi continuer sa progression et sortir des derniers niveaux miniers, qu’on ne peut finir si on reste géante.

 

Et nous voici enfin arriver à la partie la plus étrange du jeu. Jusqu’à présent, je vous ai fait un résumé survolant pas mal de zones du jeu, pour se concentrer sur l’histoire. Mais la fin du jeu mérite d’être un minimum détaillée. Une fois qu’on a retrouvé le contrôle de son corps, on peut conserver la taille d’un adulte normal, et prendre un tout petit passage qui mérite qu’on passe en rampant, afin de sortir de cette mine de malheur possédée par des démons et l’esprit des ouvriers morts pour leur travail. On rampe donc vers la sortie, et au moment où devrait s’afficher un écran de fin, une explication du jeu ou quelque chose pour nous dire qu’on a réussi à s’échapper de cet enfer sous terre, l’écran devient blanc. Oui, il n’y a absolument rien qui se passe, l’ordinateur ne répond plus, on ne peut pas revenir en arrière. Pourquoi ? Tout simplement parce que quand on arrive à ce passage du jeu… il se supprime tout seul, et il est impossible de le récupérer, de le réinstaller, de retrouver sa sauvegarde ou quelconque élément installé du jeu.

 

Le jeu se supprime de lui-même donc, et histoire de ne pas faciliter la chose, on ne peut pas le copier ou copier un de ses éléments, on ne peut donc pas y rejouer, le résinstaller, le partager, toute trace du jeu disparaît de l’ordinateur et de la disquette de jeu, rendant la découverte des deux modes de jeu dans leur intégralité impossible. A sa sortie en 1989, la gronde des joueurs a été énorme lors de la découverte de ce « souci » majeur. Quelques tentatives de copies ont bien été faites, mais à l’époque, le piratage n’était pas aussi banal et poussé qu’aujourd’hui. Il était donc impossible de faire en sorte que Ghast rejoigne Porto à la lumière du jour, ou presque : il fallait acheter plusieurs versions du jeu. Et encore une fois, Karvina Corp a poussé le vice de ne sortir que 5000 copies du jeu, et de ne pas faire de second pressage, rendant l’obtention du jeu très difficile quelques mois après sa sortie. Et en seules explications, les développeurs ont simplement dit :

 

« Killswitch was designed to be a unique playing experience: like reality, it is unrepeatable, unretrievable,and illogical. One might even say ineffable. Death is final; death is complete. The fates of Porto and her beloved Ghast are as unknowable as our own. It is the desire of the KarvinaCorporation that this be so, and we ask our customers to respect that desire. Rest assured, Karvina will continue to provide the highest quality of games to the West, and that Killswitch is merely one among our many wonders. »

 

« Killswitch a été conçu pour être une expérience de jeu unique: comme la réalité, il est irrépétable, illisible et illogique. On pourrait même dire ineffable. La mort est définitive, la mort est complète. Les destins de Porto et son bien-aimé Ghast sont aussi inconnaissables que les nôtres, et nous demandons à nos clients de respecter ce désir. Karvina continuera à fournir la plus haute qualité de jeux à l’Ouest, et que Killswitch est simplement un parmi nos nombreux merveilles.« 

Vous vous en doutez, ce communiqué n’a pas eu l’effet escompté. Le mot « bien-aimé » a piqué l’intérêt des joueurs qui ont terminé le jeu avec Porto, d’autant plus que Ghast n’est présent à aucun moment dans l’histoire de l’héroïne. Les dernières copies restantes du jeu ont été dévalisées, les revendeurs étaient pris à partie pour les retrouver avant que plus aucune ne soit disponible et jouable dans le monde, tout le monde souhaitant lever le mystère de cette aventure. Une des croyances populaires des joueurs étaient que Ghast devenait les gaz inhalés par Porto, commençant ainsi le début de l’aventure de cette dernière. D’autres pensaient qu’il était possible de jouer simultanément avec les deux en finissant les premiers niveaux de Ghast. Le souci… c’est que le jeu était en rupture de stock avant le communiqué de Karvina. Ceux qui n’avaient pas terminé le jeu essayèrent de faire les niveaux de Ghast, mais le premier étant déjà très difficile, personne n’a prétendu découvrir la vérité et finir le jeu avec ce personnage. Tous finirent finalement par céder à la facilité, et à terminer le jeu avec Porto, pour voir cet écran blanc synonyme de fin totale de l’aventure Killswitch.

Le jeu fut oublier par la plupart des joueurs pendant des années, les consoles de salon commencèrent à se démocratiser pour les joueurs et la 3D a relégué la 2D d’antan au rang de has been. Il faudra attendre 2005 pour que le jeu refasse parler de lui, avec une enchère sortie miraculeusement du trou du cul du monde. Le jeu était mis aux enchères… dans sa version neuve et blistée, chose que l’on pensait perdue depuis 16 ans. Avec une enchère de départ de 1$, la copie du jeu a finalement été acheté 73300$ par un japonais du nom de Yamato Ryuichi, un tokyoïte fan de la première heure du jeu. Il s’agit de la dernière copie du jeu connue pouvant encore fonctionner aujourd’hui, toutes les autres ayant été rendues inutilisables après avoir fini le jeu et ayant fini au fond d’une poubelle au l’aube des années 90. Bien entendu, l’homme qui a acheté le jeu a déclaré immédiatement après avoir obtenu le jeu son intention de finir le jeu avec Ghast et d’enregistrer son périple pour que le mystère soit finalement levé, car personne à part les développeurs qui ont gardé la bouche bien cousue pendant presque deux décennies ne savent ce qu’il se passe dans cette partie de l’aventure. Mais la malédiction du jeu a malheureusement continué : la seule vidéo de 1min45 qu’il a posté à ce jour fut celle de l’écran de choix du personnage, visible par dessus son épaule sur son écran d’ordinateur. La seule chose qu’on entend, c’est Yamato en pleure, ne sachant que faire, et se rendant compte qu’une fois qu’un des deux modes de jeu terminé, il aurait dépensé 733000$ pour une disquette inutilisable… On ne l’a pas revu sur Internet depuis, et sa vidéo a été supprimé, et personne ne sait s’il est devenu totalement fou a essayé de finir la partie que personne n’a atteint, ou s’il a cédé à la facilité et a voulu essayé une dernière fois le jeu qu’il a tant chéri dans sa jeunesse.

 

Étrange n’est-ce pas, cette histoire de jeu qu’on ne peut finir qu’une fois et qui disparaît des écrans radar une fois la fin supposée arrivée. Le mystère qui entoure ce creepy game est encore plus fort que Polybius, le jeu d’arcade qui est censé être sorti uniquement à Portland en 1981. Je vous imagine déjà essayer de trouver des vidéos du jeu ou une éventuelle copie qui resterait dans la nature, et ça voudrait dire que cette petite histoire a fonctionné.

Pourquoi ? Tout simplement parce que les mythes et fantasmes sur ce sujet ne sont issus qu’une histoire fictive créée par Catherynne M. Valente dans The Melancholy of Mechagirl, un recueil d’histoires de science-fiction et de mythes urbains, avec tant de complexité et de détails qu’ils semblent plus que vrais. Mais il y a quelque chose qui me chagrine dans cette histoire : ce livre est sorti le 14 juillet 2013, on est d’accord ? Mais pourquoi on retrouve la trace exacte de cette histoire dans dans un article datant de du 13 décembre 2007 sur le site Invisible Games, hein ?

 

Vous pouvez retrouver plus d’informations sur cette étrange histoire dans les liens suivants:

Invisiblegames.net

Killswitch Wikia

Killswitch: A Fakeloric Product in situ

The Melancholy of Mechagirl

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